LOUISE LABE



LOUISE LABE
1524-1566

Découvrez deux des plus beaux sonnets de Louise Labé, dite " La Belle Cordelière", poétesse lyonnaise de la Renaissance, grande amoureuse et assurément féministe avant l'âge. Elle fut contemporaine de Du Bellay, Ronsard et Maurice Scève, à une époque où, s'inspirant de l'Italie et des poètes de l'Antiquité, le sonnet en langue française s'est imposé comme une forme majeure de la poésie française.

Les sonnets suivants font partie de ses "24 sonnets" publiés en 1555.

Le sonnet VIII est le plus connu, souvent mentionné dans la littérature. Sur le modèle des sonnets de Pétrarque, il est d'une construction mathématique très travaillée.


SONNET VIII

Je vis, je meurs : je me brule et me noye.
J'ay chaut estreme en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ay grans ennuis entremeslez de joye :

Tout à un coup je ris et je larmoye,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure :
Mon bien s'en va, et à jamais il dure :
Tout en un coup je seiche et je verdoye.

Ainsi Amour inconstamment me meine :
Et quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me treuve hors de peine.

Puis quand je croy ma joye estre certeine,
Et estre au haut de mon desiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.


SONNET IX

Tout aussitôt que je commence à prendre
Dans le mol lit le repos désiré,
Mon triste esprit, hors de moi retiré,
S'en va vers toi incontinent se rendre.

Lors m'est avis que dedans mon sein tendre
Je tiens le bien où j'ai tant aspiré,
Et pour lequel j'ai si haut soupiré
Que de sanglots ai souvent cuidé fendre.

Ô doux sommeil, ô nuit à moi heureuse !
Plaisant repos plein de tanquillité,
Continuez toutes les nuits mon songe ;

Et si jamais ma pauvre âme amoureuse
Ne doit avoir de bien en vérité,
Faites au moins qu'elle en ait en mensonge.